18/10/2009
L'Armée du crime
Morts pour la France
Ils étaient tous de très jeunes juifs, Hongrois, Polonais, Roumains,Espagnols, Italiens, Armeniens
Ils avaient fui le fascisme à Budapest, le génocide en Arménie, les franquistes en Espagne, tous, déterminés à combattre pour liberer la France
A la tête du groupe, l'ouvrier poète Missak Manouchian
Un film sur " l'heroisme au quotidien" dira Guediguian
Réalisé par Robert Guédiguian
Avec Simon Abkarian, Virginie Ledoyen, Robinson Stévenin
"Dans Paris occupé, le réseau Manouchian harcèle nazis et collaborateurs français, réussit quelques coups d’éclat comme l’assassinat du général SS, responsable du Service du travail obligatoire (STO). A la suite de dénonciations, le groupe – vingt-deux hommes et une femme - est démantelé, arrêté, torturé, exécuté. L’ Affiche Rouge, rendue célèbre par le poème de d’Aragon et placardée partout par le régime pétainiste, dénonce et fustige cette « armée du crime » composée « d’étrangers, de juifs, de communistes » qualifiés de « terroristes » et non de résistants…"
L’histoire du groupe Manouchian vous accompagne depuis longtemps ?
Robert Guédiguian.
Oui, j’ai grandi avec cette histoire. Ces personnages, qui s’organisent progressivement comme une armée mais qui restent frondeurs et libertaires, font partie de mes héros favoris. Je les classe auprès de Che Guevara, de Robin des bois, de tous ces héros populaires qui appartiennent à la légende du mouvement ouvrier, à la mémoire de la gauche et de la Résistance. Pendant longtemps, ces hommes, victimes de la propagande, du mensonge de l’Affiche rouge, n’ont pas été assez honorés. Depuis que les archives de la préfecture de police ont été ouvertes, l’Histoire a été faite. Le rôle des étrangers dans la Résistance et celui de la police française ont été clairement établis. Pechanski, Courtois et Rayski ont écrit ce livre important paru en 1989, Le Sang de l’étranger. Les immigrés de la MOI (organisation des étrangers au sein du PCF, ndlr) dans la Résistance. Avant, il y avait des confusions, et notamment, une campagne contre le Parti communiste dans les années 1980 ; on a dit que le PC avait donné ces gens-là qui étaient plutôt trotskistes.
Lorsque Ariane Ascaride dit : « la France, c’est le pays des droits de l’Homme, il ne peut rien nous arriver », le film prend une résonance très contemporaine. Cette légende, selon vous, peut nous aider à vivre ici et maintenant ?
R.G. Oui, l’idée de mettre une morale au-dessus de tout, au-dessus des intérêts privés, au-dessus des intérêts communautaires, et même au-dessus des lois - car ils étaient dans l’illégalité -, est une leçon qui peut nous servir en tout temps, à toute époque. Reconstruire cette idée, proposer cette histoire comme modèle d’identification à des jeunes gens, cela me semble très important. Il s’agit d’une exigence morale humaniste. L’interdiction qui empêche aujourd’hui d’aider les sans-papiers, de les faire entrer chez soi, est une idée atroce. Moralement, c’est impensable. Si quelqu’un frappe à ma porte pour me demander un quignon de pain, je ne vais pas lui demander ses papiers.
« L’Affiche rouge », présentait les portraits de dix résistants parmi les vingt-trois qui allaient être condamnés à mort et fusillés, au mont Valérien, le 21 février 1944. Ces hommes, qui appartenaient au « groupe Manouchian » - du nom de leur chef du moment, Missak Manouchian -, étaient des membres des Francs-Tireurs et partisans de la MOI, l’organisation des étrangers au sein du PCF.
Paru dans Regards n°64, septembre 2009
A voir pour ne pas oublier
Vous n'aviez réclamé la gloire ni les larmes
Ni l'orgue ni la prière aux agonisants.
Onze ans déjà que cela passe vite onze ans
Vous vous étiez servi simplement de vos armes
La mort n'éblouit pas les yeux des Partisans
Vous aviez vos portraits sur les murs de nos villes
Noirs de barbe et de nuit hirsutes menaçants
L'affiche qui semblait une tache de sang
Parce qu'à prononcer vos noms sont difficiles
Y cherchait un effet de peur sur les passants.....
Ils étaient vingt et trois quand les fusils fleurirent
Vingt et trois qui donnaient leur coeur avant le temps
Vingt et trois étrangers et nos frères pourtant
Vingt et trois amoureux de vivre à en mourir
Vingt et trois qui criaient La France en s'abattant
Musique de Léo Ferré, 1959
20:06 Publié dans cinema | Lien permanent | Commentaires (10) | Tags : film l'armée du crime robert guédiguian