Israël-Palestine : la course vers l'abîme

Les bombardements quotidiens de populations civiles israéliennes par le Hamas, depuis des mois, la terreur qu’il engendre, ses buts de guerre affichés, sont inacceptables ; ceci ne légitime néanmoins en rien la violence israélienne actuelle qui ne peut que susciter que colère et indignation. Depuis la mort d’I. Rabin, Israël agit de la pire des façons en réponse aux défis qui sont les siens, la guerre avec ses ennemis mais aussi la paix. Au prétexte qu’ils ne disposent jamais du bon interlocuteur, les gouvernements israéliens n’ont eu de cesse de miner de l’intérieur la société civile palestinienne en cherchant ainsi à légitimer une violence et une guerre larvée qui tue et mutile en semant la haine sur son passage : (colonisation à outrance, restriction des libertés et humiliations, construction du mur, blocus de Gaza, appauvrissement). Il y a encore cinq ans, Israël affirmait qu’Arafat était la cause de tous ses maux. Arafat disparu, Israël n’a jamais donné à Mahmoud Abbas la place d’un interlocuteur légitime, contribuant ainsi à l’émergence des franges radicales du Hamas.

Alors même que chacun sait qu’aucune solution par les armes n’est possible, les drames qui se déroulent en Palestine illustrent à l’absurde l’impasse dans laquelle Israël s’est engagée avec ses soutiens inconditionnels (ceux que Tahar Ben Jelloun appelait si justement à l’ occasion de la guerre du Liban de 2006 « Les amis d’Israël qui le pousse vers l’abime » ). En réponse à un contexte international délétère, aux défis posés par le terrorisme international et l’islamisme, l’armée israélienne, sa population perdent leur âme, la considération de la communauté internationale et les valeurs démocratiques de leur pays, sans gagner une once de sécurité. La politique israélienne bien au contraire légitime les radicaux des deux bords (ultranationalistes israéliens et armée d’un coté ; islamistes/Iran de l’autre) au détriment de ceux, de plus en plus rares, qui en Israël et en Palestine tentent de maintenir un dialogue et un futur de coexistence. Ainsi, qui entend la désespérance et la vision de paix de Daniel Barenboïm et de son orchestre israélo-arabe, seul citoyen ayant la double nationalité israélienne et palestinienne ? Qui écoute aujourd’hui les propos de Leila Chahid qui il y a quelques années encore dialoguait a la télévision française avec Israël au nom de Y. Arafat ?

Isaac Rabin a été tué par les siens pour sa vision de faire accepter à son pays l’idée d’une paix respectueuse des aspirations légitimes du peuple palestinien, avec son pire ennemi d’alors, Yasser Arafat. A qui peut-on faire croire aujourd’hui qu’en discréditant systématiquement les revendications palestiniennes, qu’en tentant de délégitimer ceux qui combattent sa politique, qu’en niant les effets de la politique perverse de colonisation on sert aujourd’hui la cause d’Israël et de la paix ?

Les termes d’un accord d'Israël avec les Palestiniens, acceptables par les deux parties, sont connus maintenant depuis de nombreuses années. Ils imposent de la part d’Israël de considérer avant tout le peuple palestinien comme un partenaire respectable pour une paix juste, sans lui dicter sa conduite. Le retrait unilatéral de Gaza qui aurait pu être une occasion formidable de renouer les liens détruits n’a fait qu’exacerber la violence de part et d’autre. Il n’est pas acceptable de confondre la légitime aspiration des Israéliens à vivre en sécurité et l’acceptation d’une politique indigne.

Comment agir pour obtenir d’Israël qu’il tourne le dos à une politique mortifère ? Barack Obama, les nouveaux leaders israéliens, l’Europe si timorée, mais aussi les leaders palestiniens auront-ils le courage, le charisme et la vision nécessaires pour retrouver les chemins tracés par A. El Sadate, I Rabin, B. Clinton et Y. Arafat ?