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04/11/2008

Interview dans La Tribune du 1er novembre 2008 de Ségolène Royal

Interview dans La Tribune du 1er novembre 2008sego 8.jpg

"La France est un des pays les plus attractifs au monde. Il n'y a aucune raison que cela cesse."


La Tribune : Après la crise financière, on sent poindre une crise économique, craignez-vous une crise sociale dans la foulée ?

Ségolène Royal : Mais elle est déjà là. Le nombre de travailleurs pauvres a augmenté, la précarité et le chômage aussi. Même les cadres se sentent tirés vers le bas : une majorité d'entre eux se déclare en situation de déclassement social. Dans beaucoup d'entreprises, la colère monte. Et elle prend d'autant plus d'ampleur que, tout d'un coup les salariés, réduits au pain sec, découvrent que pour sauver le système financier on peut mobiliser très rapidement des dizaines de milliards d'euros. Par ailleurs, les mêmes qui parlent aujourd'hui de mettre des règles dans le système financier, continuent à casser les règles du code du travail. Tout cela me semble très dangereux. Pour que la dynamique économique reparte il faut que les salariés soient sécurisés, bien formés et bien payés. Les entreprises seront alors plus performantes parce que la productivité horaire du travail sera meilleure. Voilà le cercle vertueux dont la France a besoin.

Si vous étiez aux manettes que feriez-vous face à la multiplication des plans sociaux ?

D'abord je fais entrer l'Etat au capital des banques pour sauver les entreprises. Dans le même temps, je répercute la baisse du brut en baissant les prix de l'énergie. J'augmente immédiatement le pouvoir d'achat en supprimant le paquet fiscal que je transforme en un 13ème mois pour 8 millions de salariés. Et enfin je stoppe les délocalisations boursières. Et tout cela tout de suite. Arcelor Mittal a par exemple décidé de fermer ses hauts fourneaux en Europe. C'est impensable alors que la demande mondiale d'acier continue à augmenter. Ce groupe fait des profits. L'Etat doit demander aux entreprises qui pratiquent de telles délocalisations de rembourser la totalité des aides et des exonérations de cotisations. Elles y réfléchiraient à deux fois.

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Avez-vous songé aux conséquences que cela aurait sur les investissements étrangers ?


La France est un des pays les plus attractifs au monde. Il n'y a aucune raison que cela cesse. Quand on regarde de près les motivations des investissements étrangers, on constate que notre pays est apprécié parce que son système éducatif, son système de santé, son réseau de transports et de communication sont performants. Il faut aussi de méfier de ces chantages supposés. Regardez ce qui a été dit au sujet du bouclier fiscal : c'était soi-disant le meilleur moyen de rapatrier les fortunes en France. Aucune fortune n'est revenue. Parce qu'il faut tout déclarer pour en bénéficier ? Je rappelle que le coût de la fraude fiscale est de 40 milliards, c'est-à-dire la quasi-totalité du déficit public de l'Etat.

D'une façon générale comment jugez-vous la gestion de la crise par Nicolas Sarkozy ?

L'annonce précipitée d'un plan d'un plan tous les deux jours est la traduction de l'inertie qui a prévalu depuis son élection. Car il a été élu dans un contexte de crise économique qui appelait des mesures immédiates. Or qu'a-t-il fait depuis un an et demi sur le plan économique : le bouclier fiscal et les mesures les plus irresponsables demandées par un Medef ami du pouvoir, avec des riches qui paient moins et tous les autres qui sont précarisés. Il n'y a plus qu'en France que le législateur se plie aux caprices d'un certain patronat, allant jusqu'à bafouer des accords entre partenaires sociaux. Vous vous souvenez que l'Etat, après avoir encouragé le patronat et les syndicats à négocier, s'est ensuite assis sur la négociation pour en casser le résultat par la loi. Or il est prouvé que la qualité du dialogue social est un moteur d'efficacité, parce que c'est gagnant pour l'entreprise et gagnant pour les salariés. Mais pour cela il faut la confiance et par ces méthodes d'un autre âge la confiance a été brisée.

Les parachutes dorées, les stocks-options sont aujourd'hui sur la sellette...

Pas du tout. Nicolas Sarkozy souhaite que le Medef s'autodiscipline ! Ah bon ? Les gens vont décider eux-mêmes de baisser leurs salaires ? Vous y croyez ? Et si au moins, la politique économique menée depuis un an et demi avait été efficace ! Regardez ce qu'en pensent les patrons de PME : 90% d'entre eux estiment que rien de rien n'a été fait pour eux. J'aurais fait le small business act tout de suite. J'aurais tout fait, comme nous l'ont encore demandé de jeunes patrons d'entreprises de pointe à Toulouse, pour qu'ils puissent augmenter leurs fonds propres et que les banques prennent des risques sur l'innovation. C'est pour cela qu'il faut des fonds d'innovation et la banque publique d'aide aux PME. Pourquoi une banque publique ? Parce qu'elle sera dispensée de spéculer et se concentrera sur l'aide aux entreprises qui innovent.

Nicolas Sarkozy a-t-il suffisamment œuvré pour débloquer le marché interbancaire ?


Le marché interbancaire pouvait être débloqué en 24 heures ! Quand l'Etat met dix milliards dans les banques, il est en droit d'attendre que les banquiers lui obéissent. Non seulement les banquiers qui ont failli sont toujours en place (malgré les promesses de sanctions), mais le crédit interbancaire n'est toujours pas débloqué.

Qu'est-ce qui manque ? La pression sur les banques ?

Ce qui manque, c'est l'autorité de l'Etat. Ce qui manque, c'est que l'Etat entre au capital des banques ! Ce qui manque, c'est de la cohérence, c'est le respect des contribuables qui sont en droit d'attendre que l'on agisse en leur nom. En revanche, ce qui ne manque pas, c'est une connivence de classe comme il n'y en a nulle part ailleurs en Europe entre le pouvoir actuel, certains banquiers et certains grands patrons, notamment ceux qui sont propriétaires des médias. Comme je l'ai déjà proposé, aucun groupe financier ou industriel vivant de la commande publique ne devrait posséder plus de 25% d'un média. Car si les médias, au nom de l'opinion publique, étaient beaucoup plus sévères pour contrôler les mauvaises décisions et exiger les bonnes, au nom du bon sens, nul doute que les choses iraient mieux.

Nicolas Sarkozy a quand même mis d'accord tous les pays de la zone euro sur le plan coordonné...


C'est Gordon Brown qui a été le déclencheur de cet accord, mais reconnaissons que tout le monde y a mis du sien... Et même s'il vaut mieux tard que jamais, tout le monde sait que cela aurait pu être fait plus tôt. Il aurait fallu bouger dès l'année dernière, au moment de la crise des subprimes. Les banquiers savaient parfaitement qu'il y avait des financements croisés entre les banques françaises et américaines, que des banques françaises avaient acheté des créances douteuses. Comment Nicolas Sarkozy et Christine Lagarde peuvent-ils oser affirmer qu'ils découvrent la crise financière ? Soit ils mentent, soit ils sont incompétents.

L'Union européenne a décidé de lancer un plan d'action pour soutenir l'économie. La soutenez-vous ?

Oui bien sûr et je souhaite que ce plan s'accélère et que cela réussisse. Il y a des leviers considérables de croissance économique : habitat durable, éducation, santé, grandes filières industrielles, automobile, aéronautique, sidérurgie, tout cela en relevant le défi de la lutte contre le réchauffement planétaire.

La crise va-t-elle au moins permettre de conforter la construction européenne ?

La crise peut être une chance si elle permet de changer le système, les règles du jeu, les rapports de force et non pas consolider un système perverti qui vient d'aller dans le mur. Si rien n'est fait, on sait qu'il y aura d'autres crises, en raison notamment des pratiques prédatrices de fonds d'investissement non réglementés, qui, comme avec la CAMIF, cherchent à faire du profit sur le dos des PME. Le risque c'est que tout recommence, puisque rien ne change. Les traders sont toujours payés en fonction de l'argent qu'ils retirent des spéculations boursières, sans aucune pénalité quand ils font perdre de l'argent.

Certains économistes disent que les fonds alloués aujourd'hui aux banques vont créer une nouvelle bulle spéculative...

C'est possible parce que ces 10 milliards, ils vont où ? Ils sont utilisés comment ? On ne sait pas. On est quand même dans un système fou. Si cela se trouve, les banques continuent à spéculer avec ces fonds, puisque l'Etat n'est pas au conseil d'administration et n'exige pas que ces 10 milliards soient uniquement utilisés pour octroyer des crédits interbancaires ou pour financer l'innovation des PME. C'est très grave : l'Etat a trouvé de l'argent pour les coupables de la crise et ses victimes, les entreprises et les ménages, les contribuables, n'ont aucun moyen de savoir comment leur argent va être utilisé. Pourquoi n'y aurait-il pas dans les conseils d'administration des épargnants, des citoyens, des associations de consommateurs, le centre des jeunes dirigeants, la CGPME... Voilà la vraie réforme de la gouvernance des banques.

La gauche européenne est restée bien muette dans cette crise.

C'est dommage. Le Parti socialiste européen devrait se faire entendre. Peut-être est-ce à cause d'une structure trop lourde, mais il n'est pas trop tard pour organiser un forum global sur le nouveau système de société et de production qu'on doit mettre en place. En plus la crise est une opportunité pour les idées de gauche. Il y a une réhabilitation du rôle de la puissance publique. Il ne s'agit pas non plus de tomber dans une économie étatisée mais de prouver que les droits et les devoirs, cela doit être pour tous, à chaque échelon de la société.

Et comment expliquer que le Parti socialiste français ne prenne pas aujourd'hui plus de poids, dans un contexte qui lui est favorable ?

Parce que le PS doit se reconstruire. Je ne vais pas en rajouter sur la nécessité pour le PS de changer, de se rénover en profondeur et de porter un projet alternatif à la hauteur des défis du temps présent.



Propos recueillis par Hélène Fontanaud, Ivan Best et Pierre Kupferman

 

 

 

 

 

13:38 Publié dans Politique | Lien permanent | Commentaires (17) | Tags : politique

Commentaires

"Il est important d'y croire..." disait mon grand-père, cinq minutes avant de mourir... mais sans vouloir mettre trop de doutes en place, que ferait Ségolène si les urnes l'avaient placée là où elle pense, comme beaucoup de nos concitoyens certainement, qu'elle serait à sa place ?
Ceci étant, je n'y crois (cf plus haut) pas "à sa façon", du moins pas complètement... mais je te soutiens si "elle" est ton (votre) choix de militant(e)s car dans le fouillis socialiste il faut quand même s'y retrouver à l'heure actuelle...non ? et trouver un cap à tenir...
bisous

Écrit par : Doume | 04/11/2008

Aucune chance d'être sacrée ...à Reims pour Ségolène,trop tard ,son tour est passé.Elle lance un rien de poudre aux yeux que parfois nous recevons de trop près.Trop tard...Que peut une femme seule...Trop tard...Elle ne sera pas souveraine à Reims...Trop tard.

Pierre

Écrit par : ulm pierre | 04/11/2008

Pierre

Elle ne cherche pas à être sacrée et elle n'est pas seule

et en votant "la motion E" on vote pour toute une équipe

et pour moi l'espoir est à Gauche

bises

Écrit par : noelle | 04/11/2008

Nono, t'as vu mon carnet ??
bonne soirée!
bisous

Écrit par : doume | 04/11/2008

Je ne pense pas parler ou plutôt méditer pour ne rien dire et dis ce que je pense avec ma réflexion propre et ma pensée comme je dis avec humour invisible et jamais trahie.J'essaie d'aller à l'essentiel sur les blogs car pour moi je suis invité en fin de compte.
Je me comprends quand je dis seule c'est à dire sans aide sur certaines thématiques comme l'économie sur sa campagne où elle n'avait rien sur quoi s'appuyer et DSK ne l'a pas aidée bien au contraire.Mais si, elle brigue le poste suprème au PS et c'est normal d'ailleurs elle s'est soulagée du non cumul des mandats pour mieux se préparer.
La solicitude est encore bien souvent l'affaire des femmes et il faut plaider pour une nouvelle façon de penser le rapport à autrui.
Les grandes valeurs sont en crise.Ce sont de trés belles valeurs mais elles n'arrivent plus à transformer le réel.Il faut peut être revenir à des valeurs moins évidentes moins intimidantes pour voir ce qu'il y a à faire.La solidarité, mot absent du vocabulaire de Ségolène, pose l'humain dans le lien.Oui nous sommes tous et dans tous les sens du terme dans une société du lien; oui mondialement lié et cela je pense que Ségolène ne l'incarne pas.

Pierre

Écrit par : ulm pierre | 04/11/2008

Si Pierre , le mot solidarité existe et fraternité...

As tu lu les motions? la motion est parfaitement claire, elle consiste d'abord à rassembler la gauche, toute la gauche

Theme central de la campagne" rénovation" et redonner espoir

Écrit par : noelle | 04/11/2008

L'ami Goerges Frêche a reçu Ségolène Royal, je crois hier...en politique tous les moyens sont bons.

Monsieur Hollande qui soutient Delanoé demande aux militants de voter utile, afin qu'une motion soit largement majoritaire...le coup de la peur, comme d'hab.!

L'une de ces 2 motions devrait l'emporter car ce ne sont pas les sympathisants qui votent, mais ceux qui ont payé la carte, les véritables militants.

Ma préférence de "sympathisant" va à Martine Aubry...

Attendons jeudi soir !

Écrit par : Alsacop | 04/11/2008

Alsa

payer sa carte ne fait pas de toi "un veritable militant"

et il y a 6 motions

Écrit par : noelle | 04/11/2008

Il va falloir un leader, une, pourquoi pas, mais sa nomination comme "secrétaire" n'assurera pas une qu'elle ou lui sera "candidat(e)" ... par leader, j'entends beaucoup et je pense que faire l'unité dans le PS, déjà l'esquisser sera une dure partie, celle ou celui qui en sera chargé(e) aura du pain sur la planche, quant à DSK, je ne lui souhaite rien, surtout pas de ré-apparaitre en dernière minute, et profiter du travail... Delanoe et Aubry sont de bons maires mais je ne leur prête pas de capacités à fédérer... je ne parlerai pas des jeunes pas du tout présents sauf "critiques"...mais qui ont d'autres ambitions peut-être ?...et puis 6 motions c'est un peu trop ? non ?
et comme dirait Jacques : ... mais il est tard "Nono" ... il faut que je rentre ...chez moi !!!
bisous et bonne nuit - merci pour le ;-)

Écrit par : Doume | 04/11/2008

Je suis ok, pas besoin d'une carte pour militer.

Mais le peu de ceux qui votent jeudi, ce ne sont pas tous des militants ? lol

Rocard & Jospin, vieillissants, se tournent vers Delanoé, à ma grande surprise Moscovici aussi.

Royal...pour ma part,préférence à Aubry; j'avais omis le pôle écolo, Hamon (dommage mais Emmanuelli me dérange) et les "utopia" qui reviennent une seconde fois.

Écrit par : Alsacop | 04/11/2008

Comme signataire de la motion E il y a mon maire, Gérard Collomb.
Lui c'est du solide, du concret et avec lui on avance.
Je vous défie de trouver à Lyon un lyonnais de gauche ou de droite qui le critique.
Quant à Ségolène ?
Pourquoi pas.
Elle a encore des progrès à faire, mais qui n'en a pas.
Un Noir aux États-Unis et une femme en France.C'est le renouveau.
Ceci dit Pierre, je suis très sensible à ta réflexion sur le lien.
Quant à l'avenir à gauche, je suis d'accord avec Noelle. D'ailleurs même Sarko s'y met. Tant qu'à faire autant qu'il laisse ceux qui savent (faire à gauche).

Écrit par : Rosa | 04/11/2008

Parce que le PS doit se reconstruire.

Il faut quand même espérer que ça ne prenne pas trop de temps. Il faudra vite tourner la page Hollande et son immobilisme.

Écrit par : Rosa | 04/11/2008

Rosa

je te trouvais bien silencieuse!

alors, jeudi soir on sera 2?

Demain, départ pour le bassin, pour la journée

des bisous bonne nuit

j'ai oublié, biensûr, Pierre, tu es invité ,toujours avec plaisir!

Écrit par : noelle | 05/11/2008

Rosa

je te trouvais bien silencieuse!

alors, jeudi soir on sera 2?

Demain, départ pour le bassin, pour la journée

des bisous bonne nuit

j'ai oublié, biensûr, Pierre, tu es invité ,toujours avec plaisir!

Écrit par : noelle | 05/11/2008

Noelle, il y a des jours où le silence est d'or.

Écrit par : Rosa | 05/11/2008

D'or, Rosa, bravo ! nous finirons riches ;-)
bonne journée

Écrit par : doume | 05/11/2008

Camarade, il serait temps de finir les enfantillages !

Une page importante de l’histoire de l’humanité est entrain d’être écrite sous nos yeux.

L’opposition devrait vouloir peser dans le débat pour qu’un VRAI Nouveau Bretton Wood sorte de la conférence du G20 à Washington. Lors de cette conférence notre avenir et celui de nos enfants sera décidé pour le pire ou le meilleur !

Nous ne pouvons pas accepter que l’empire financier de la City et de Wall Street impose une dictature mondiale avec Gordon Brown et Dominique Strauss Kahn.

Nous sommes devant une grave crise sociale et pire ! Si le PS ne s’attaque pas tout de suite à la réalité, un débordement par Besancenot est fort probable. Ca serait une catastrophe pour notre pays ! Irrationnel et violence organiseront le débat.

Pour aiguiser vos convictions politiques et économiques, je vous propose de lire le nouveau tract de Jacques Cheminade, l’indispensable rupture avec l’empire financier ! http://solidariteetprogres.org/IMG/pdf/TRACT_2008_11_03_NBW_1_.pdf

David C.
David.cabas.over-blog.fr

Écrit par : David C. | 08/11/2008

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