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17/01/2011

L'espoir Tunisien

Analyse Edwy Plenel

Extrait

Par son courage, le peuple tunisien vient de montrer aux habitants du monde arabo-musulman, du Maghreb au Machrek, qu'il n'y a pas de fatalité à la servitude et que des régimes apparemment inébranlables peuvent s'effondrer sous le poids de leurs injustices et de leurs impostures. Les Egyptiens, par exemple, qui supportent l'indétrônable Hosni Moubarak depuis plus de trente ans – il fut « élu » pour la première fois le 14 octobre 1981, et réélu en 1987, 1993, 1999 et 2005 avec des scores souvent supérieurs à 80% –, ne peuvent que méditer l'audace de la rue tunisienne qui met fin à plus de vingt-trois ans de présidence Ben Ali – il avait déposé pour sénilité son mentor Habib Bourguiba (1903-2000) le 7 novembre 1987.

Or tous ces pouvoirs plus ou moins autoritaires, qui désespèrent les espoirs de la rue arabe et donnent ce visage d'immobilisme politique à la région, sont soutenus par les puissances occidentales, activement ou silencieusement. La menace islamiste est leur caution et leur alibi. Caution de leur existence intouchable : retournant à leur profit l'idéologie du choc des civilisations, ils se posent en rempart contre l'extrémisme musulman. Alibi de leurs crimes impunis : partenaires de la ténébreuse guerre antiterroriste, ils y trouvent des excuses pour leurs violations des droits et leurs vols des richesses. La vérité est pourtant qu'ils ont enfanté cet islam politique, non seulement en trahissant leurs promesses initiales mais, souvent, en étant les premiers à utiliser l'arme religieuse pour mater, par le passé, les contestations sociales et démocratiques qui les ébranlaient.


Telle est la radicale nouveauté introduite par l'insurrection tunisienne : le retour au premier plan de la question démocratique et de la question sociale, indissociables. Qu'il s'agisse de l'Afrique du Nord ou du Proche-Orient, c'est le surgissement d'un message d'espoir après tant de décennies dominées par la régression religieuse, les replis identitaires et les affrontements sectaires. Se battre pour la liberté et l'égalité, pour le droit de s'exprimer et le droit de travailler, pour le droit d'avoir des droits tout simplement, c'est échapper aux identités immuables et aux communautés fermées. C'est chercher et inventer ce qui rapproche et rassemble, au lieu d'exacerber ce qui divise et ce qui éloigne. C'est en somme construire ensemble un avenir politique dont l'exclusion et l'intolérance ne seraient plus les normes. Un avenir où la raison l'emporterait sur la croyance.

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