Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

23/05/2008

LE JARDIN

Mon  iriseraie à moi

538726459.jpgils sont 3
"merci d'être, sans jamais te casser , une fleur de gravité....
tu accompagnes le retour du jour....."
1524368219.jpg
1085993581.jpg
2034067163.jpg
712651567.jpglà, c'est sur un sentier....

13:06 Publié dans jardin | Lien permanent | Commentaires (6) | Tags : coup de coeur

30/04/2008

Laurent Terzieff


le crucifié des hautes paroles
845481986.jpgLaurent Terzieff a une très haute idée du pouvoir vibrant des mots, aussi chacun d’eux transmis par lui, ne s’élève que lesté du poids du monde.

« On n’éclaire pas sans brûler » disait Nicolas de Staël, et Laurent, immense charbon noir, aura tant et tant brûlé pour nous faire lumière et nous apporter le feu volé aux dieux et surtout à la nuit.
Emacié comme un christ flamand, avec son sourire fait des ronces des douleurs du monde, il semble toujours faire sacrifice de lui-même pour que les hautes paroles des poètes ne restent pas cachées dans leurs hautes solitudes.

« Se mettre à l'écoute du monde, pour en être la caisse de résonance ». telle aura été sa trajectoire aveuglante, calciné lui-même, il dépose avec son sourire déchiré son amoureuse sagesse.
Derrière les carreaux, le vent fait danser des ombres lentes.
Les visages n’osent plus apparaître, ils sont sans doute éteints depuis si longtemps, Laurent leur redonne vie à ces enfants de Malte Laurids Brigge de Rilke, à ceux des demeures enfouies sous les orties et les violettes de Milosz, à ceux des forêts froides de Berthold Brecht.
 Homme des heures graves « il prend le devant de tout adieu, comme s’il se trouvait derrière lui »(Rilke).
Laurent Terzieff est le grand témoin des biefs de la douleur d’être au monde, de ses joies aussi, quand simplement la pluie des mots nous rafraîchit.
« Le monde triste et beau qui ressuscite soudain »

Le cinéma aura bâti une image de lui loin de sa réalité.
Certes Rossellini, Pasolini, Bunuel, Carné, Garrel ce n’est point mineur, mais Laurent Terzieff s’est avant tout voulu acteur de théâtre, adaptateur de textes inconnus en France, metteur en scène et directeur de sa troupe. Passeur en poésie donc, mais aussi en théâtre nous faisant découvrir des auteurs rares avec sa compagnie, fondée contre vents et pas mal de marées dés 1961.

Pour elle il aura accepté des rôles alimentaires, mais l’imposture par le mensonge du cinéma des traits figés du romantique tricheur, il l’aura laissée dans les ornières des apparences.
Claudel, Schisgal, Albee, Saunders, Mrozek, Milosz, Rilke,Pirandello, Harwood, et tant d’autres sont revenus parmi nous grâce à lui.

Mais le plus beau don sera et restera celui de la poésie réincarnée, et il joue seul, maintenant que la douce et lumineuse Pascale de Boysson s’est absentée, un florilège de poèmes. Réconfort, dernier passage, la poésie aura peut-être volé sa mort, mais elle aura sauvé sa vie sa vie.
" Je ne vois pas de poète qui ait porté aussi loin le besoin fou d'amour, la souffrance, la barbarie, l'injustice, mais en même temps l'éblouissement devant la beauté de la vie. En premier lieu, je voudrais parler de la conscience du temps chez Milosz, le temps comme de l'éternité volée ».
Ces paroles de Terzieff sur Milosz sont presque autobiographiques
« Vie ! ô amour sans visage ! Toute cette argile a été remuée, hersée, déchiquetée, jusqu’aux tissus où la douleur elle-même trouve un sommeil dans la plaie
Et je ne peux plus, non, je ne peux plus, je ne peux plus ! »
1781025218.gif

Cette citation du poème « La charrette », poème qui tient tant à cœur à Laurent, en dit suffisamment sur ce théâtre-miroir, lieu de fusion entre visible et invisible qui fut toute sa vie, elle en dit aussi beaucoup sur l’homme.
Homme à la solitude acceptée et bienvenue, homme libre et désenchanté, Terzieff est ce grand corps troué d’étoiles, posé parmi nous, au doux milieu de nous.
Il nous donne à manger dans sa main le pain noir,le lait et le miel sauvage de la poésie
« Et c’est vous et c’est moi. Vous et moi de nouveau, ma vie ».    

Association Esprits Nomades

 

 

14:19 Publié dans poesie | Lien permanent | Commentaires (1) | Tags : coup de coeur

17/04/2008

LE DERNIER FRERE

Il existe à l’Île Maurice un cimetière bien entretenu où sont enterrés des Juifs qui n’avaient pas l’intention d’y mourir. En 1940, en route, pleins d’espérance sur l’Atlantic, pour la terre promise, avec, à bord, quelques 1500 personnes, ils ont été refoulés par les Britanniques sur cette île-colonie qui leur appartenait. De cet exil imposé dans un camp au joli nom de Beau-bassin, ils ne connaîtront que la réalité sordide de l’enfermement.

1933010524.jpg

 

Soudain les boucles de David ont commencé à trembler, ses épaules aussi et il a caché la tête dans ses genoux qu’il avait ramenés sur sa poitrine en s’asseyant. Puis j’ai entendu ses sanglots. Je les connaissais très bien ces pleurs qui font hoqueter, qui font dire doucement aaahh, comme si quelqu’un vous enfonçait lentement, très lentement un couteau dans le cœur, je connaissais très bien ces pleurs qui sortent comme de nulle part, soudain, alors qu’on est pourtant tranquillement assis sur une pelouse grasse et verte et que le soleil chauffe les épaules. Je me suis redressé, une envie terrible de l’appeler, de le réconforter, lui dire comme Anil me disait, arrête de pleurer, ça va aller, ton nez coule et beurk tu avales la morve, ça nous faisait toujours rire de dire cela, tu avales la morve et il rajoutait c’est salé, non ? et, l’instant d’après j’avais oublié mes larmes. Ce jour-là, j’ai fait comme David cette chose qui m’arrivait de temps en temps, un nœud qui se serre soudain au creux de mon ventre, la difficulté de respirer, ces larmes qui montent et contre lesquelles on ne peut rien. J’ai enfoui ma tête dans les feuilles et j’ai pleuré, comme lui à quelques mètres de moi. Extrait p.58

Rien ne prédisposait ces deux enfants à la rencontre, l’un de Prague, l’autre mauricien, l’un blond, l’autre noir ; ni la langue, ni la culture, ni l’espace, encore moins leur histoire respective ne pouvait conduire à cette amitié par delà les mots et les grillages

 

Un très beau  roman, magnifique

 un roman du souvenir et de l’absence qui lui vaudra le Prix de La FNAC 2007

438186204.jpg

 

Natacha Appanah, journaliste, écrivain. Née à l'île Maurice, Natacha Appanah est journaliste depuis 10 ans. Elle a travaillé pour Le Dauphiné libéré, Le Télégramme de Brest, GEO... Elle collabore aussi régulièrement avec Radio France International et la Radio Suisse Romande. Natacha Appanah a aussi écrit 3 romans : Les rochers de poudre d'or, Blue Bay palace, La Noce d'Anna, aux éditions Gallimard. Elle donne des cours de presse écrite à l'IPJ.

19:39 Publié dans mes livres | Lien permanent | Commentaires (0) | Tags : coup de coeur